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Au troisième étage du musée, L’Appartement accueillait une intervention de Tobias Kaspar. L’Appartement est un espace d’exposition singulier et paradoxal : il s’agit de la reconstitution du logement de Ghislain Mollet-Viéville qui, de 1975 à 1991, au 26 de la rue Beaubourg à Paris, déployait une activité de promotion de l’art minimal et conceptuel. « Je parle de paradoxe dans le sens où, à la fin des années 1970, lorsque j’ai ouvert à la rue Beaubourg, explique Mollet-Viéville, on ne voyait cet art intellectuel que dans des espaces aseptisés white cube. Mon but était alors de rendre plus agréable à vivre cet art en le montrant dans un autre contexte, notamment dans un cadre de vie confortable et convivial tel qu’un appartement. Ce qui n’était pas évident du tout à l’époque ». 

En 2020, en pleine pandémie, Tobias Kaspar, confronté à la fermeture des galeries, des foires, des musées et centres d’art, construit un projet visant à résoudre à la fois ses difficultés financières et l’absence d’expositions en « louant sa vie ». Avec Rented Life, la vie de l’artiste est en effet décomposée en différents postes de dépenses correspondant à autant de « lots » proposés en abonnement. Dans le catalogue qui accompagne le projet, certains postes sont génériques (assurance, cigarettes, appartement), quand d’autres dessinent des habitudes sociales spécifiques : café Americano, panier de légumes, cours de Pilates, etc. Certains titres reflètent les idéologies du marketing : le forfait téléphonique est intitulée World, salt.ch (Unlimited Phone Data) ou encore Music Spotify® Premium Family. Les œuvres se déploient selon divers registres stylistiques et narratifs. Il est dit, par exemple, de la série de monochromes qu’elle est une tentative de reproduire la couleur du champagne. Quant aux photographies argentiques, elles ont été prises avec un appareil jetable dont l’obsolescence fait écho à celle des voyages en avion, un mode de déplacement fortement restreint par la pandémie. Existent aussi des œuvres offertes en abonnement pour couvrir les frais de voiture avec chauffeur : elles consistent en une série de petits chevaux modelés dont la finesse et le soin évoquent une pratique d’amateur. 

La marchandise est au cœur des interrogations sur la postmodernité, qui l’envisage comme un piège ou un mécanisme à neutraliser. L’ensemble des procédures engagées par Tobias Kaspar, qui découpe sa vie en postes budgétaires et en lots, s’affranchit de cette problématique et conjugue récits d’émancipation et d’assujettissement, critique institutionnelle et distinction sociale, marketing et « commodification » de la culture.

  • Exposition organisée par Julien Fronscaq
  • Avec le soutien de la Fachstelle Kultur Kanton Zurich, de la Landis & Gyr Stiftung et de la Stiftung Erna und Curt Burgauer
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